jeudi 7 juin 2012

Qu'attendent les patients d'une consultation de la douleur chronique ?

La prise en charge du syndrome douloureux chronique est complexe et peut nécessiter de recourir à une structure d'étude et de traitement de la douleur chronique (voir article de mon blog). Les patients y sont adressés par leur médecin traitant.

Mon expérience clinique me prouve chaque jour que les attentes des patients sont souvent différentes de celles de leur médecin ; elles sont par ailleurs très variables d'un patient à l'autre. Or, la prise en compte des attentes des patients, en termes d'objectifs et de moyens, est indispensable pour élaborer un projet thérapeutique personnalisé et consensuel.




Depuis le mois de novembre 2011, j'ai systématiquement consigné les attentes des patients qui venaient me consulter pour la première fois. Je présente ici les résultats qui concernent les 100 premiers patients de cette étude observationnelle (PAPAWAS pour PAinful PAtients WAnt Study) :




Premier constat (en termes d'objectif) : fort logiquement, 2 patients sur 3 attendent tout simplement d'être mieux soulagés, tout en ayant conscience que ce soulagement ne pourra être que partiel. Par contre, 1 patient sur 7 est en attente d'une disparition totale de la douleur : cette situation est d'emblée compliquée pour le soignant, à qui il est demandé de guérir une maladie chronique… Dans d'autres cas, l'attente est purement psychologique (le plus souvent en cas de maladie psychiatrique dont la douleur n'est qu'un des symptômes) ou fonctionnelle (essentiellement des personnes âgées confrontées au handicap). Plus surprenant, 1 patient sur 12 n'exprime aucune attente : "c'est mon médecin qui m'a envoyé, moi je ne serais pas venu(e)…" 




Deuxième constat (en termes de moyen) : 2 patients sur 3 expriment spontanément une attente précise en termes de moyens à utiliser, et se positionnent ainsi clairement en partenaire dans l'élaboration du projet thérapeutique. Point tout aussi crucial : seuls 28% des patients attendent la prescription d'un médicament ! Les attentes non médicamenteuses, rééducatives et psychologiques concernent quant à elle 34% des patients, ce qui confirme la poussée sociétale des approches dites psychocorporelles… Plus d'un patient sur 4 n'a pas d'idée précise sur les moyens à employer et s'en remet au jugement du soignant (attente passive : "c'est vous le médecin, c'est vous qui savez…").

Afin d'obtenir des données plus précises et de définir des facteurs influençant les attentes des patients douloureux chroniques, l'étude PAPAWAS va se poursuivre dans le temps. Ces résultats préliminaires apportent des éléments intéressants : choix des filières de soins (douleur, handicap, psychiatrie, médecine générale), développement des approches psychocorporelles, place limitée des médicaments…