samedi 10 mars 2012

Information scientifique sur la douleur : plaidoyer contre les clichés et la démagogie…

L’Association Internationale pour l’Etude de la Douleur (IASP) a publié en janvier 2012 une étonnante « pain clinical update ». L’auteur de cette lettre [1] est américain et présente les raisons qui, selon lui, expliquent les insuffisances actuelles en termes de prise en charge de la douleur.


Premier coupable : la médecine fondée sur les preuves ou « evidence-based medicine ». Cette approche moderne de la médecine, basée sur des résultats obtenus au sein de larges populations, est montrée du doigt comme un véritable tyran, qui nierait l’individu au profit des chiffres… L’auteur en appelle aux Droits de l’Homme et à l’Ethique pour justifier l’utilisation à l’échelle individuelle de molécules dont l’efficacité n’a pu être démontrée dans les études cliniques.

Deuxième coupable : la coalition médico-économique. Les recommandations de bonnes pratiques ne seraient le plus souvent que le reflet des opinions individuelles des experts qui les fabriquent, et non pas la traduction des données scientifiques. Ces mêmes experts ne seraient motivés que par des raisons financières et/ou politiques, la faute au capitalisme… La communauté des rédacteurs (bénévoles) de recommandations scientifiques appréciera !

Les opioïdes forts seraient, selon l’auteur, les premiers sacrifiés sur l’autel de la pensée unique. Même si les preuves scientifiques vont dans le sens d’un bénéfice-risque défavorable, la faible utilisation des morphiniques dans un contexte de douleur chronique non cancéreuse serait la conséquence du conformisme ambiant.

Les dernières phrases de ce texte parlent d’elle-même : « Les soignants ont besoin de s’occuper de leurs patients et pas de les considérer comme des clients. Le bien-être de l’individu doit prévaloir sur les coûts et les besoins du système de santé. L’essence du soin est de prendre soin des patients ». Au 21e siècle, est-il encore raisonnable d’écarter toute considération économique lorsqu’il s’agit de l’état de santé de la population ?


Vision individualiste (et non sociétale), théorie du complot, déni des enjeux économiques : tous les clichés démagogiques sont passés en revue dans un texte qu’il est bien surprenant de lire sur le site internet d’une société savante internationale !