samedi 24 novembre 2012

Traitement médicamenteux de la douleur chronique : à boire et à manger…

La prise en charge de la douleur chronique est si complexe qu'elle conduit parfois à utiliser des médicaments à l'efficacité incertaine et/ou non dépourvus de risques. Il s'agit le plus souvent de molécules assez anciennes, qui tentent leur come-back en profitant des insuffisances des nouvelles venues… C'est par exemple le cas du clonazépam (voir article de mon blog) ou de la kétamine (voir article de mon blog) : le premier semble maintenant en voie d'extinction, alors que la deuxième fait l'objet d'un regain d'intérêt, malgré de nombreuses études peu concluantes et un rapport bénéfice –risque manifestement peu favorable (à suivre)…




Parmi les pratiques un peu surprenantes, il faut citer l'ACUPAN® (chlorhydrate de néfopam). Médicament ayant obtenu son autorisation de mise sur le marché (AMM) en 1980, il n'est disponible en France que sous forme d'ampoules injectables, dans l'indication "traitement symptomatique des affections douloureuses aiguës, notamment des douleurs post-opératoires". Pourtant, certains patients présentant un syndrome douloureux chronique se voient prescrire ce médicament avec la consigne de l'avaler… sur la base de l'expression bien connue en médecine : "tout ce qui s'injecte peut se boire", mais sans preuve d'efficacité et d'innocuité.

La commission de la transparence de la Haute Autorité de Santé publie en date du 3 octobre 2012 un nouvel avis concernant l'ACUPAN®. Fait important, elle y rappelle que "le service médical rendu par cette spécialité reste important dans l’indication de l’AMM". Elle précise également 3 notions importantes :
  • Concernant le fait de boire des ampoules injectables : "Une utilisation par voie orale a été décrite, elle n’est pas conforme à l’AMM". "Compte tenu de l’usage détourné par voie orale, la commission souhaite que le laboratoire commercialise la forme comprimé qui dispose d’une AMM en France depuis 1980".
  • Concernant la douleur chronique : "Cette spécialité est un médicament de première ou de deuxième intention selon l’intensité de la douleur. L’attention est portée sur le risque de pharmacodépendance qui existe avec cette spécialité ; elle ne doit pas être utilisée pour les douleurs chroniques".
  • Concernant le choix de la molécule : "Il existe des alternatives thérapeutiques".

A ce jour, une chose est claire : il n'est pas recommandé de faire boire des ampoules d'ACUPAN® au patient douloureux chronique…

samedi 17 novembre 2012

Fibromyalgie : le Canada publie des recommandations en langue française

La société canadienne de rhumatologie publie sur son site internet des « lignes directrices » pour le diagnostic et la prise en charge du syndrome fibromyalgique. Rédigé par un groupe de travail pluri-professionnel (soignants canadiens, représentant des patients et expert international), le document mis en ligne s’adresse aussi bien aux professionnels de santé qu’aux patients. Il comporte en tout 53 pages : sa lecture prend donc un certain temps, mais une version « courte » des 46 recommandations (voir en fin de ce post) est proposée en annexe…




Premier constat : les niveaux de preuve qui accompagnent chaque recommandation sont en grande majorité très faibles, ce qui témoigne des connaissances encore très insuffisantes sur la question. 70% des recommandations sont de grade D, ce qui signifie qu’elles découlent de l’opinion des experts (dont les conflits d’intérêts sont déclarés en début de document, voir article de mon blog) ou d’études de très faible qualité. Seules 17% des recommandations sont de grade A.

Deuxième constat : les 8 recommandations de grade A concernent toutes la prise en charge du syndrome fibromyalgique, mais aucune le diagnostic ou le suivi des patients. De sorte que la médecine sait proposer des prises en charge efficaces à un syndrome qu’elle a encore beaucoup de mal à diagnostiquer, puis à suivre de façon adaptée… Ces 8 recommandations de grade A (voir plus bas, en gras) concernent :
  • Recommandations n°8 : la nécessité d’une prise en charge par les professionnels de santé de premier recours (le syndrome fibromyalgique n’est pas qu’une affaire de spécialiste) ;
  • Recommandations n°8 et 13 : la globalité de la prise en charge (multi facettes en canadien), en s’appuyant si besoin sur une équipe multidisciplinaire (voir article de mon blog) ;
  • Recommandations n°18, 20 et 21 : l’efficacité des thérapies cognitives et comportementales (TCC), visant à améliorer l’auto-efficacité du patient (voir article de mon blog) et à maintenir une activité physique adaptée et régulière ;
  • Recommandation n°22 : l’absence, à ce jour, de preuve d’efficacité des « médecines douces et parallèles » (par exemple : homéopathie, phytothérapie, acupuncture, chiropraxie) ;
  • Recommandation n°33 et 34 : l’intérêt de certains antidépresseurs et antiépileptiques, dont la tolérance doit être surveillée (la recommandation 35 rappelle que seules la prégabaline et la duloxétine sont approuvées au Canada, toute autre prescription étant « non conforme »).

Ces lignes directrices rappellent également un certains nombre de vérités qui méritent d’être rappelées : bienveillance, écoute et non jugement de la part des soignants sont nécessaires ; l’autonomisation du patient doit être promue ; chaque situation est différente et requiert un suivi individualisé… Voici le paragraphe qui résume à mon sens le mieux le contenu de ces recommandations : "Comme la fibromyalgie ne peut pas être guérie, la prise en charge optimale doit être concentrée sur la douleur ainsi que sur la symptomatologie d’ensemble que constitue ce syndrome. Tout en étant propre au patient, le traitement doit comprendre une approche non pharmacologique et peut également inclure la prise de médicaments. Les professionnels de la santé devraient être en mesure de comprendre l’interaction entre les mécanismes neurophysiologiques et psychologiques en cause dans la FM, et être conscients qu’elle comporte un éventail de symptômes".

Référence
Fitzcharles MA, Ste-Marie PA, Goldenberg DL, Pereira JX, Abbey S, Choinière M, Ko G, Moulin D, Panopalis P, Proulx J, Shir Y. Lignes directrices canadiennes 2012 pour le diagnostic et la prise en charge du syndrome de fibromyalgie.


Synthèse des recommandations (en gras : preuve de grade A)

Section 1 : diagnostic

1. La fibromyalgie, syndrome caractérisé par un cycle d’exacerbation et de latence des symptômes, devrait être diagnostiquée suite à la présence depuis au moins trois mois, de douleurs corporelles diffuses chez un individu qui peut aussi manifester des symptômes de fatigue, des troubles du sommeil, des changements de nature neurocognitive, des troubles de l’humeur ainsi que d’autres manifestations somatiques d’intensité variable, et lorsque les symptômes ne peuvent pas être expliqués par une autre maladie [Niveau 5, Grade D].

2. Tous les patients dont les symptômes sont compatibles avec un diagnostic de fibromyalgie, devraient être soumis à un examen physique répondant aux normes, à l’exception de la sensibilité à la pression des tissus mous (c.-à-d. hyperalgie, douleur accrue suite à un stimulus douloureux) [Niveau 4, Grade D].

3. L’examen des tissus mous visant à évaluer la sensibilité générale devrait être exécuté par palpation manuelle, tout en considérant que l’examen de points sensibles douloureux précis, tel qu’énoncé dans les critères de 1990 de l’ACR, n’est plus nécessaire à la confirmation d’un diagnostic clinique de fibromyalgie [Niveau 5, Grade D].

4. Le diagnostic de la fibromyalgie devrait reposer sur une évaluation clinique globale, sans épreuves de laboratoire de confirmation, ainsi que le recours à des analyses de laboratoire simples comme l’hémogramme, la vitesse de sédimentation (VS) de même que le dosage de la protéine C-réactive (C.R.P.), de la créatine kinase et de la thyréostimuline (TSH). Tout autre examen de laboratoire ou radiographique devrait résulter de l’évaluation clinique d’un patient donné si l’on soupçonne la présence d’une autre anomalie [Niveau 5, Grade D].

5. Le médecin de premier recours devrait poser le diagnostic de FM aussi tôt que possible, sans solliciter la confirmation d’un médecin spécialiste, et communiquer le diagnostic au patient. Suite au diagnostic, il faut s’abstenir de faire des examens à répétition sauf, en cas d’apparition de nouveaux symptômes ou signes lors de l’examen physique [Niveau 5, Grade D].

6. Les critères 2010 de l’ACR pour le diagnostic de la fibromyalgie peuvent servir à l’évaluation initiale, en vue de confirmer un diagnostic clinique de fibromyalgie tout en sachant que les symptômes fluctuent au fil du temps [Niveau 3, Grade B].

7. Les professionnels de la santé devraient savoir qu’une douleur corporelle s’apparentant à celle de la fibromyalgie peut aussi faire partie des manifestations de certaines autres affections médicales ou psychologiques. En outre, les patients chez qui on a diagnostiqué d’autres maladies peuvent également présenter une fibromyalgie concomitante [Niveau 5, Grade D].

8. On devrait concentrer la prise en charge des personnes souffrant de FM dans un contexte de soins de premier recours, constitués de professionnels de la santé bien informés et, idéalement, lorsque possible, accompagnés de l’accès à une équipe multidisciplinaire [Niveau 1, Grade A] ou à des membres d’équipe en mesure de leur fournir du soutien et de les rassurer [Niveau 3, Grade C].

9. Les consultations auprès de spécialistes, y compris les spécialistes du sommeil et les psychologues, peuvent être indiquées pour certains patients ciblés, mais des soins suivis prodigués par un spécialiste, ne sont pas recommandés et devraient être limités aux patients, pour qui la prise en charge en contexte de soins de premier recours a échoué ou, qui présentent des comorbidités plus complexes [Niveau 5, Grade D].

10. Dans le cadre des soins de santé aux personnes aux prises avec la fibromyalgie, les professionnels de la santé devraient connaître la pathogenèse de la fibromyalgie [Niveau 5, Consensus], faire preuve d’empathie, d’ouverture et d’honnêteté, ne pas afficher d’attitudes négatives et intégrer le patient au processus décisionnel [Niveau 3, Grade D].

11. Les professionnels de la santé devraient savoir, que dans le cadre d’études de recherche, des anomalies neurophysiologiques objectives ont été identifiées chez des patients atteints de fibromyalgie, mais qu’elles ne peuvent servir dans un cadre clinique au diagnostic ou aux soins des personnes atteintes de fibromyalgie [Niveau 5, Grade D].

12. Les patients et les professionnels de la santé, devraient reconnaître que des facteurs génétiques, de même que des événements traumatiques antérieurs, peuvent être en cause dans l’apparition de la fibromyalgie, mais, qu’il est déconseillé d’accorder une attention exagérée à un événement déclencheur, car cela peut compromettre les soins au patient [Niveau 5, Grade D].

Section 2 : prise en charge

13. L’approche thérapeutique visant les patients souffrant de fibromyalgie devrait intégrer des principes de prise en charge autonome, dans un cadre multi facettes [Niveau 1, Grade A]. Il est recommandé de porter attention à chacun des symptômes dans le contexte d’une approche personnalisée, tout en assurant une surveillance étroite et un suivi constant, principalement au début de la prise en charge [Niveau 5, Grade D].

14. À l’instauration du traitement, on devrait encourager les patients à cibler des objectifs précis, relatifs à l’état de santé et la qualité de vie, ainsi que procéder à la réévaluation des objectifs tout au long du suivi [Niveau 5, Grade D].

15. Les approches non pharmacologiques comprenant la participation active du patient, devraient faire partie intégrale du plan thérapeutique de la prise en charge de la fibromyalgie [Niveau 1, Grade A]. La promotion de l’auto-efficacité et le soutien social favoriseront la pratique de modes de vie sains [Niveau 3, Grade D].

16. Dans la mesure du possible, on devrait encourager les personnes atteintes de fibromyalgie à mener une vie normale, par la répartition ou l’augmentation progressive des activités, en vue de conserver ou d’améliorer la capacité fonctionnelle [Niveau 4, Grade D].

17. L’acquisition de capacités d’adaptation efficaces et la promotion de la prise en charge autonome sont favorisées par une approche thérapeutique à composantes multiples [Niveau 5, Grade D].

18. On devrait faire la promotion des interventions visant à améliorer l’auto-efficacité afin d’aider les patients à composer avec les symptômes de fibromyalgie [Niveau 1, Grade A].

19. En regard de la détresse psychologique présente dans les cas de fibromyalgie, l’évaluation psychologique ou la consultation pourraient s’avérer bénéfiques pour cette clientèle [Niveau 5, Consensus]. De plus, on devrait sensibiliser les patients à reconnaître la présence de cette détresse et les informer de ses conséquences sur le bien-être [Niveau 3, Grade D].

20. La TCC, même sur une courte période, est utile pour aider à atténuer la crainte inspirée par la douleur et l’activité physique [Niveau 1, Grade A].

21. Les personnes qui souffrent de fibromyalgie devraient participer à un programme d’activité physique adapté de leur choix, afin de retirer les bienfaits globaux pour la santé et les répercussions possibles sur les symptômes de fibromyalgie [Niveau 1, Grade A].

22. Les patients devraient être informés du fait que pour le moment, nous ne disposons pas de données probantes pour appuyer le recours aux médecines douces et parallèles (MDP) pour la prise en charge des symptômes de fibromyalgie, les bienfaits probables n’ayant pas été évalués adéquatement [Niveau 1, Grade A].

23. Les patients devraient être incités à divulguer leur usage de MDP au professionnel de la santé qui doit faire preuve de compréhension et de tolérance envers cet aveu et fournir l’information disponible fondée sur la recherche relative à l’efficacité et aux risques [Niveau 5, Consensus].

24. Les médecins devraient identifier les symptômes les plus nuisibles afin d’orienter le traitement pharmacologique en fonction d’une approche ciblant les symptômes. Le choix pharmacologique idéal ciblera simultanément plusieurs symptômes et pourrait être constitué d’une combinaison de médicaments, auquel cas, il faudra tenir compte des interactions médicamenteuses [Niveau 5, Grade D].

25. Les traitements pharmacologiques devraient être amorcés par de faibles doses suivies de hausses progressives et prudentes, en vue d’éviter les intolérances aux médicaments [Niveau 5, Grade D], et suivis d’évaluations constantes en ce qui a trait à l’efficacité et à l’apparition des effets indésirables, tout en étant conscients que les effets indésirables attribuables aux médicaments peuvent présenter des similitudes avec les symptômes de fibromyalgie [Niveau 5, Consensus].

26. Les médecins qui recommandent les médicaments pour la fibromyalgie, devraient avoir l’esprit ouvert et être conscients du grand éventail de produits offerts pour soigner ces symptômes, et ne devraient pas restreindre le traitement à une seule classe de médicaments [Niveau 5, Consensus].

27. Conformément à la hiérarchie par paliers des antalgiques de l’Organisation mondiale de la santé, l’acétaminophène (paracétamol) peut convenir à certains patients tout en s’assurant de s’en tenir à un dosage sécuritaire [Niveau 5, Consensus].

28. Dans le cas où un AINS est recommandé, surtout en présence de maladies concomitantes comme l’arthrose, il devrait être utilisé à la plus faible dose et pendant la durée la plus courte possible, afin d’éviter l’apparition d’effets indésirables graves [Niveau 5, Grade D].

29. Une tentative avec les opioïdes, en débutant par un produit à faible dose comme le tramadol, devrait être réservée aux patients qui présentent des douleurs d’intensité modérée à forte, et qui n’ont pas été soulagés par le biais des autres approches thérapeutiques [Niveau 2, Grade D].

30. L’usage d’opioïdes puissants est déconseillé et, de plus, les patients qui persistent à utiliser les opioïdes devraient démontrer une amélioration de la douleur et de la capacité fonctionnelle. Les professionnels de la santé doivent exercer une surveillance continue du maintien de l’efficacité, des effets indésirables et des comportements aberrants à l’égard des médicaments [Niveau 5, Grade D].

31. L’essai d’un traitement pharmacologique de cannabinoïdes sous ordonnance pourrait être envisagé pour un patient aux prises avec la fibromyalgie, particulièrement en situation de perturbations appréciables du sommeil [Niveau 3, Grade C].

32. On devrait expliquer aux patients qui souffrent de fibromyalgie, les effets modulateurs de la douleur attribuables aux antidépresseurs, afin de dissiper la notion voulant qu’il s’agisse d’un symptôme d’origine psychologique [Niveau 5, Grade D].

33. Toutes les classes de médicaments antidépresseurs, y compris les ATC, les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine ainsi que les inhibiteurs du recaptage de la sérotonine-noradrénaline, peuvent servir au traitement de la douleur et autres symptômes chez les patients atteints de fibromyalgie [Niveau 1, Grade A], le choix étant déterminé par la présence de données appuyant l’efficacité, la connaissance du médecin, les caractéristiques relatives au patient ainsi que l’attention portée au profil d’effets indésirables [Niveau 5, Consensus].

34. L’effet modulateur de la douleur relié à l’usage des médicaments anticonvulsivants, devrait être expliqué et le traitement devrait être entrepris à la plus faible dose possible, suivie d’un ajustement à la hausse, tout en surveillant l’apparition d’effets indésirables [Niveau 1, Grade A].
35. Les médecins devraient savoir, que seules la prégabaline et la duloxétine, sont approuvées par Santé Canada pour la prise en charge des symptômes de la fibromyalgie, et que toutes les autres thérapies pharmacologiques représentent des produits dont l’emploi est non conforme [Niveau 5, Consensus].

Section 3 : évolution de l’état de santé
36. Le suivi clinique devra reposer sur le jugement du médecin ou de l’équipe soignante et comportera généralement des visites plus rapprochées au début de la prise en charge, et ce jusqu’à la stabilisation des symptômes. [Niveau 5, Consensus].

37. Dans le contexte du suivi continu d’un patient atteint de fibromyalgie, toute nouvelle manifestation symptomatique devrait faire l’objet d’une évaluation clinique afin d’éliminer la possibilité que ce symptôme soit attribuable à une autre maladie [Niveau 5, Consensus].

38. Les patients devraient être informés que l’évolution de l’état de santé chez plusieurs personnes est favorable, même si au fil du temps les symptômes de fibromyalgie sont modulés par un cycle d’exacerbation et de latence [Niveau 3, Grade B].

39. On devrait offrir aux patients qui ont subi au cours de leur vie des traumatismes qui ont altéré leur bien-être psychologique, et qui n’ont pas été pris en charge efficacement, un soutien approprié en vue de favoriser l’atteinte des objectifs en matière d’évolution de l’état de santé [Niveau 5, Consensus].

40. Les médecins devraient être à l’affût de facteurs tels que la passivité, le faible locus de contrôle interne et la présence d’un trouble de l’humeur, car ces derniers nuisent à une bonne évolution de l’état de santé [Niveau 5, Consensus].

41. Il est possible de mesurer l’évolution de l’état de santé par une approche de médecine narrative ou à l’aide du PGIC (patient global impression of change) sans avoir recours à des questionnaires plus complexes [Niveau 3, Grade C].

42. Les objectifs du patient ainsi que leurs niveaux d’atteinte devraient être documentés et servir d’approche de suivi de l’évolution de l’état de santé [Niveau 5, Consensus].

43. L’examen des points sensibles douloureux ne devrait pas servir de critère d’évaluation [Niveau 3, Grade C].

44. L’évolution de l’état de santé étant généralement moins favorable chez les gens sans emploi, les médecins devraient inciter les patients à demeurer en emploi et, lorsque nécessaire, faire des recommandations visant la conservation d’un niveau de productivité optimal [Niveau 3, Grade C].

45. Les patients aux prises avec la fibromyalgie, qui sont en congé de maladie depuis longtemps, devraient être encouragés à participer à un programme de réhabilitation adapté, visant l’amélioration de la capacité fonctionnelle et, si possible, le retour en emploi [Niveau 5, Grade D].

46. Chez les personnes qui souffrent de fibromyalgie, il est essentiel de reconnaître les autres maladies concomitantes comme la dépression, et d’en assurer la prise en charge en vue d’abaisser les coûts de soins de santé [Niveau 3, Grade C].

samedi 10 novembre 2012

Prise en charge de la douleur : droit des patients et obligations des soignants

La revue Médecine & Droit propose à ses lecteurs un article de 3 pages sur les droits des patients et les obligations du médecin en termes de prise en charge de la douleur. Code de déontologie médicale, charte de la personne hospitalisée, loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, certification des établissements de santé : tous ces référentiels concourent à une amélioration des pratiques… et au respect des droits des patients.




Le texte de cet article est court, synthétique et résume très bien le cadre juridique actuel. Il rappelle notamment que le médecin est soumis à 2 types d’obligations différentes :
  • Une obligation de résultat en ce qui concerne la prévention, l’évaluation et la prise en compte de la douleur du patient. Prévention, évaluation : il est assez simple d’évaluer le respect des bonnes pratiques (protocoles, utilisation d’échelles d’évaluation…). Par contre, l’obligation de prise en compte de la douleur reste un concept assez flou. Il faut malgré tout savoir qu’un manque de communication, traduit par le patient comme un défaut de considération, est la source la plus fréquente de litiges…
  • Une obligation de moyens en termes de traitement, sans obligation de résultat, du fait de l’existence de douleurs décrites par l’auteur comme « non traitables (notamment certaines douleurs cancéreuses ou neuropathiques) » (sic). Par ailleurs, le médecin bénéficie d’une liberté de prescription, pourvu que cette liberté respecte les règles de l’art et la volonté du patient.

En cas de litige, 2 types de documents seront expertisés :
  • Le dossier du patient, à la recherche d’une adéquation entre l’évaluation de la douleur et le traitement proposé (il est donc capital d’y consigner toutes ces données) ;
  • Le protocole de soin : rédigé pour offrir une réponse standardisée aux problèmes fréquents, il témoigne de la qualité de l’organisation mise en place. Cependant, il ne doit pas être considéré comme une sorte de rempart juridique ni empêcher une prise en charge personnalisée des situations les plus complexes…

A la lecture de cet article, une chose est claire : la prise en charge de la douleur doit répondre autant à des exigences humanistes que juridiques…





samedi 3 novembre 2012

CHRONODOL® : quels patients adresser à une structure d’étude et de traitement de la douleur chronique ?

Cette question mérite d’être posée. En effet, 20% de la population française présenterait une douleur chronique d’intensité modérée à sévère [1]. Il est bien évident que les structures d’étude et de traitement de la douleur chronique (SDC) (voir article de mon blog) ne sont pas en capacité de prendre en charge plus de 10 millions de français, si motivées soient-elles… Ce n’est d’ailleurs pas leur rôle : la prise en charge de la douleur chronique fait partie des missions de l’ensemble des professionnels de santé, les SDC ne devant être sollicitées que pour les situations les plus « rebelles ». Encore faut-il que la prise en charge globale de ces situations complexes soit précoce, avant que les facteurs de chronicisation ne soient trop nombreux (voir article de mon blog)

Or le constat de la Haute Autorité de Santé est le suivant [2] : lorsqu’ils sont adressés à une SDC, la douleur des patients évolue depuis plus de 2 ans dans 53% des cas (étude réalisée en 2009). Un recours plus précoce aux SDC semble donc nécessaire : c’est ce qu’a bien compris l’Agence Régionale de Santé du Centre en intégrant à son Projet Régional de Santé 2012-2016 un volet spécifique « douleur chronique ». Cette attitude est à saluer, car un tel volet n’a rien d’obligatoire : elle témoigne d’un vrai engagement institutionnel et des liens forts bâtis au fur et à mesure des années entre l’ARS et les professionnels des SDC de cette région. Un des axes du volet « douleur chronique » a pour objectif « d’identifier rapidement, au domicile et en hospitalisation, les syndromes douloureux chroniques ou susceptibles de le devenir ». C’est en fin d’année 2011 qu’est né le projet CHRONODOL®...




Confié à l’association INDOLOR, ce projet a été mise en œuvre en partenariat avec l’ARS du Centre (dans le cadre de sa politique régionale), l’Association Francophone pour Vaincre les Douleurs (AFVD, association de patients ayant obtenu l'agrément national pour représenter les usagers dans les instances hospitalières ou de santé publique) et les laboratoires SANOFI (soutien financier d’un projet sur le thème « maladies chroniques et territoire »). L’objectif était de créer un outil d’aide à la décision, destiné aux professionnels de santé, pour les aider à identifier précocement les patients pour qui le recours à une SDC doit être envisagé. Après 9 mois de travail collectif, j’ai le plaisir d’annoncer la naissance de CHRONODOL® !




CHRONODOL®, c’est aujourd’hui un dépliant qui regroupe :
  • Des données sur le syndrome douloureux chronique [3] et sur les apports des SDC
  • Une grille d’items pour guider la décision du professionnel de santé
  • La liste des SDC de la région Centre, avec des coordonnées complètes